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Le Kaba Ngondo, de la genèse à nos jours

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Bonjour à tous. Toujours très ravi de vous retrouver pour un nouvel article sur la culture africaine. Aujourd’hui, on va découvrir la robe Kaba Ngondo.

Alors, qu’est-ce que c’est le Kaba Ngondo ?

Le Kaba Ngondo, ou simplement kaba, est le nom d’une très large robe originaire du Cameroune. Le kaba est un vetement exclusivement réservé aux femmes, bien que son nom soit au masculin. Le plus souvent en Wax, la robe fait partie intégrante des coutumes vestimentaires au Cameroun et en Afrique centrale. Le nom Kaba vient d’une distorsion de l’anglais « Cover » qui veut dire « Couverture », et « Ngondo » est le nom d’une grande fete traditionnelle annuelle du peuple des Sawa (groupe ethnique à l’origine du kaba) dont la tenue officielle est le kaba. Ce modèle de tenue très africain, et ses nombreuses variantes à travers le temps, à su conquérir le cœur de nombreuses femmes à travers le monde.

PRESENTATION DU KABA NGONDO DE L’ASSOCIATION DES FEMMES, FILLES DE MAKEPE II ET III – 2014

Hélène SAKER à l’origine du premier kaba ?

Au XIXe siècle, le Cameroun traversait une période de transformation culturelle avec l’arrivée des colons européens en terre Duala. C’est dans ce contexte social qu’en 1845 s’installaient les missionnaires britaniques Alfred et Hélène SAKER. Le couple SAKER a été très vite confronté aux habitudes vestimentaires, très peu chrétiennes, des autochtones de la région. Il faut savoir qu’à l’époque, les jeunes filles portaient de simples pagnes (parfois courts), ou étaient tout simplement seins nus.

Des filles Duala 1887 – Basel Mission Archives

Pour éviter qu’elles puissent exposer leur nudité à longueur de journée devant son mari et les autres missionnaires, Hélène SAKER décida de créer une « couverture » qui leur couvrirait tout le corps, de la tete aux chevilles. Pour se faire, elle prit un sac ample sur lequel elle persa trois trous: deux pour les bras et un pour la tete. Certains récits relatent meme que les premiers kabas avaient de longues manches qui couvraient les bras et une partie des doigts. Sous le prétexte de la pudeur chrétienne, les servants du couple de missionnaires se voient alors imposer une nouvelle mode vestimentaire “qui plaise au seigneur”, et surtout à Hélène SAKER en réalité. Ainsi naquis le tout premier kaba, qui aurait vu le jour en 1856.

Photo prise lors d’un baptême à Bonabela. 1903 – 1907 / Basel Mission Archives

Au fil du temps, ayant appris la couture de leur maitraisse Hélène, les servantes commencèrent à confectionner elles memes leur propres kabas et le rendirent plus esthétique et sophistiqqué avec le temps.

Kaba et discriminations

Le kaba est à l’époque une mode étroitement liée aux européens et à l’église (protestante). Cela prend véritablement forme lorsque le kaba devient la tenue exigée pour aller à l’église. Hélène convainquit son mari Alfred SAKER de banir la nudité dans la maison de Dieu. C’est alors que parut la mesure qui interdit l’accès à toutes celles qui n’étaient pas vétues de kaba. Les femmes autochtones qui portaient cette robe se sont donc convaincues d’etre plus évoluées, plus civilisées, que les autres encore seins nus. Grace à une grande propagande religieuse, la « couverture » se transforme alors pour les femmes noires en clef ouvrant les portes du paradis.

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En 1945 les dicriminations entre indigènes se creusèrent à nouveau, mais cette fois-ci pour une autre raison. Se faire confectionner un kaba nécessitait beaucoup de tissu, et donc un pouvoir économique minumum. Les camerounais qui pouvaient se l’offrir étaient ceux qui avaient longtemps travaillé avec les européens.

Période intermédiaire (1970 – 1980)

Après les indépendances de 1960, une élite africaine noire vit le jour et s’emparèrent des tendances vestimentaires occidentales pour se démarquer du bas peuple. Ces derniers se montraient en public avec des vestes, smokings, robes de soirées et de ville. Ceci fit basculer les paradigmes et relaya le kaba au rang de tenue de maison. Dans les années 70, le kaba était considéré comme l’uniforme des petits travaux comme: cuisiner, laver le linge, balayer et d’autres travaux ménagers. Mais aussi, on ne le portait que pour aller dans les décès ou lorsqu’on était enceinte. Le kaba était clairement relégué au second plan et n’était réservé qu’aux vieilles femmes, aux grandes mères.

Je dois avouer que cette image n’est pas totalement dépassée. Car au Gabon, chez moi, le kaba est beaucoup porté pour les raisons qui précèdent, encore à ce jour.

Des années 90 à nos jours

Les années 90 marquent un nouveau tournant pour le kaba, qui va connaitre un succès dans le monde de la haute couture. En effet, les tailleurs travaillent sur de nouveaux models pour rendre la robe beaucoup plus attractive. C’est ainsi qu’à la fin des années 1980, le mini kaba vit le jour. Avec ce nouveau model, la robe demeure ample mais cette fois taillée au niveau des genoux, sinon plus court parfois.

Mini Kaba – Africtudes.com

Au début des années 90 débute une grande vague d’exportation du kaba ngondo. Les styliste modélistes oeuvrent de plus en plus pour intégrer le kaba dans leur collection. Ly Dumas est reconnue comme la première styliste camerounaise à avoir exporté le kaba à l’internationnal. C’est à cette période que la robe des peuples du littoral s’instale profondément dans les cultures des pays frontaliers comme le Congo et le Gabon.

La styliste camerounaise Ly Dumas – 100% Culture.com

Son histoire nous donne l’élément essentiel qui caractérise la robe kaba ngondo: elle est très ample. Car oui, le kaba de base n’a pas d’autre particularité qu’être une robe extrèmement ample. D’où la nécessité dans cet article de revenir largement sur son histoire, c’est amplement mérité… 😅

Le fait que le kaba n’ait pas de traits plus ou moins définis au départ va faciliter le developpement de nouveaux modèles diversifiés. Grands, larges, longs, courts, colorés, unis… Il existe désormais une tonne de modèles extrêmement variés. Il y en a pour toutes les couches de la société et pour tout types d’événements. Des acteurs de la haute couture internationnale comme Paco Rabanne, Viktor and Rolf , Parfait Rehes et Caroline Barla (avec ses kabas en jean) augmentent la popularité de la robe en revisitant le kaba camerounais.

Le kaba en jean de Caroline Barla

Aussi, la tenue complète a emprunté des éléments à d’autres cultures. Il s’agit notamment du juppon togolais et de l’écharpe Igbo du Nigéria, que l’on retrouve dans certains modèles.

Cependant, ces modèles sont bien plus en vogue dans le monde de la haute couture et sont difficillement porté par la grande masse, qui préfère le kaba classique, pour des raisons financnières évidentes.

Ses différentes Dénominations

Avec l’évolution et la grande diversification des modèles, naissent plusieurs appellations du kaba selon différents contextes. Le mot kaba est souvent accompagné par un autre terme qui précise la catégorie du vetement, et en meme temps désigne le milieu adéquat pour le porter. C’est ainsi que lors des cérémonies mortuaire ou les cérémonies associatives, on revet un kaba Mukuku. C’est à dire un kaba pas très démonstratif, le plus discret possible! Le model à porter tous les jours, pour les activités du quotidient est le kaba Nisadi. Il est également porté pour les fetes conventionnelles et associatives. Et enfin le vetement de ville, classe et élégant, est le kaba ngondo. Par habitude, nous appellons souvent tous ces types kaba ngondo. Probablement car ce nom existe bien avant les distinctions énoncées plus haut.

Kaba Nisadi

En définitive, le kaba ngondo est une des fugures les plus importantes de la culture camerounaise. Cette robe qui au départ n’avait pas pour objectif d’embellir la femme noire s’est révelé avec le temps comme un puissant outil de beauté et de prestige. La « couverture » serait le premier vetement indigène développé sous l’influece des européens lors de la colonisation. Tout comme le voile aux Antilles, les chaines des noirs américains, le kaba ngondo connait une évolution dans l’histoire plutot heureuse. Ce que je souhaite est que l’histoire continue. Pourquoi pas une version revisitée de kaba ngondo pour hommes ?

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Written by mboasawa

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