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L’ethnie des Sawas, ou Peuple de l’Eau, compte plusieurs ethnies réparties sur les provinces du Littoral et du Sud-Ouest du Cameroun : les Bassas, Bakweris, Batangas, Doualas, Malimbas,…
L´histoire des Sawa tient ses racines de l´arrivée, en provenance de l’Angola, de Mbedi fils de Mbongo dans l´estuaire du Wouri où ils trouvent les premiers occupants à savoir les Bassa’a et les Bakoko.
Les ancêtres de Mbedi, comme tous les habitants de l´Afrique sub-saharienne à part les pygmés en Afrique Centrale et les bushmen en Afrique australe, proviennent tous de l´Egypte Nègre Pharaonique Antique qui, après leur décadence, vont partir progressivement peupler la zone sub-saharienne. Ils réussiront à reconstruire des Royaumes et des Empires du moyen-age à nos jours, mais jamais à l´image du lustre de leur Egypte Antique : Empire du Mali, Empire du Ghana, Royaume d’Abomey, Royaume Zulu,…
Les Rois Bell

Ndoumb’a Lobe (roi de 1858-1897) pacifie le pays sawa et son influence s’étend sur tout le littoral, du sud (Ntem) au nord (Mungo). Il est cosignataire avec Dika Mpondo Akwa, du traité du 12 juillet 1884 qui institue le Protectorat allemand et préserve leurs droits fonciers aux Duala. Sous son règne prend fin le monopole douala de commerce intermédiaire avec l’hinterland.
Son fils, Auguste Manga Ndoumbe (roi de 1897-1908), grand bâtisseur, développe une économie de chasse d’éléphants et de plantation, et utilise les revenus du cacao, de l’huile de palme, du bois et de l’ivoire pour faire de gros investissements immobiliers à Bonanjo. Il constitue une des plus importantes fortunes jamais amassée par un roi Douala.
Son petit-fils, Rudolf Douala Manga Bell (roi de 1908-1914), consacre essentiellement son règne à combattre le projet allemand d’urbanisme Gross Duala qui préconise, entre autre, l’expropriation des indigènes de Bonanjo, d’Akwa, de Deïdo, pour les expédier dans les quartiers de Neu-Bell, Neu-Akwa, Neu-Deïdo, au-delà d’une Freie Zone, bande de démarcation entre Européens et indigènes, large d’un kilomètre. Il perd ce combat et est pendu le 8 août 1914.
Son arrière-petit fils, Alexandre Ndoumb’a Douala (roi de 1950-1966), héritier tragique, rentre au Cameroun en 1919, après avoir passé sa jeunesse en Allemagne, ce qui incite l’administration française à le suspecter de germanophilie. Il passera plus de 30 ans à se battre pour accéder au trône. Il y parviendra en 1950, mais ne réussira jamais à rétablir la totalité de ses droits. En 1945, il est élu représentant du Cameroun à l’Assemblée nationale française et devient l’un des premiers députés africains. En 1958, il démissionne de ses mandats politiques et se retire de la vie publique.
René Dualla Manga Bell n´est autre que le fils de Eithel Dualla Manga Bell, lui-meme fils cadet du Roi Rudolf Dualla Manga Bell executé le 08 Aout 1914 par l´administration coloniale allemande. Eithel Dualla Manga Bell son père abdique en sa faveur et son oncle Alexandre Ndoumb’a Dualla Manga Bell le désigne comme successeur au Trone des Do’o Do’o et ipso facto du Canton Njo-Njo et Bell.
Le Prince René Dualla Manga Bell
Le Prince René Dualla Manga Bell est un Monarque Sawa-duala, appartenant au grand groupe Sawa et à la grande tribu bantou. Il est l’un des descendants direct de Ewal’a Mbedi ou Dwala Mbedi, l’ancetre eponyme des douala, qui ont donné leur nom à la ville et capitale économique du cameroun et dont le duala est la langue de communication et officielle de tout le peuple Sawa. Il est issu d´une grande lignée de Rois Duala, la dynastie des King Bell dont il a su preserver l´héritage, l’honneur, la puissance, l’influence et le prestige, se posant toujours en grand defenseur des plus faibles et en gardien de la tradition ancestrale Sawa.
Il a régné durant 45 ans de 1966 à 2012 sur le Canton Bell, le Canton Njo et le Royaume Do’o Do’o qui regroupe les grandes chefferies Bonapriso, Bonadouma, Bonadumbe, Bonanjo, Bonaberi de nos jours, mais qui jusqu’à la scission en 1814 s’etendait sur toute la ville de douala et voyait son influence s’etendre sur toute la région du littoral, du Sud-Ouest camerounais en détenant tous les attributs du pouvoir mystico-traditionel Sawa.
Il a présidé à plusieurs reprises le Ngondo, rassemblement annuel culturel et traditionel du peuple Sawa initié par King Akwa au 19ème siècle, en tant que Président Général dont la dernière fois en 2010. Il a instuté le Tét’Ekombo, qui se deroule chaque année au parc des princes à Bali en hommage à l’anniversaire de la mort du Roi Rudolf Dualla Manga Bell, pendu le 8 aout 1914 par l’administration coloniale allemande en revendiquant le respect du traité Germano-Duala interdisant les expropriations, les travaux forcés,… signé en 1884 par son grand-père King Ndoumb’a Lobe.
Il a traversé deux siècles de vitesse et de changements en sachant préserver sa culture et sa tradition tout en arrimant dans la modernité son peuple Sawa et son village d’origine Douala, devenu une ville cosmopolite de plus de 3 millions d’habitants, devenue la capitale économique du Cameroun et de l’Afrique centrale.
Le Prince Rene Doualla Manga Bell est ainsi devenu au fil des temps la figure emblématique du peuple Sawa et l’une des figures de proue de la chefferie traditionelle camerounaise et africaine. Il est décédé en 2012, refusant dans ses dernières volontés d’être enterré à la pagode construite par son arrière-grand-père où sont enterrés tous les Rois Bell, de ce qui tient lieu de pantheon Sawa, mais dans son caveau familial.
Le Ngondo
Le Ngondo est l’assemblée traditionnelle qui réunit tous les peuples côtiers, Douala, Bassa, Bakoko, Batanga, Yabassi,… regroupés sous le nom générique de Peuple Sawa.
La légende originelle du Ngondo : Sur les marchés du pays Pongo, transitaient les produits les plus demandés par les navigateurs… C´est là que tous les grands commerçants côtiers de cette époque se fournissaient. Malobè m´Etame M´etei ; un géant immense d´une force phénoménale entreprit de prélever une dîme personnelle sur chaque pirogue qui accostait, avec la complicité de ses frères. Les piroguiers terrorisés n´osaient plus accoster.
Le chef Ngando a Kwa du clan des Bonambele, demanda l´union de tous les chefs de clans pour faire face en commun au danger. Cette réunion eu lieu sur la rivière Bessèkè. La métaphore de l´union, Ngobi, le cordon ombical commun, désignera désormais l´assemblée des chefs de clans.
Il fit intervenir un de ses beaux-parents Ngomninga du clan Bakoko du village Yansoki. Après avoir subi tous les rites, pendant 9 semaines dans le village Akwa, il alla tout seul affronter le géant Malobè. Après 9 jours d´observation, il accosta de très bon matin, prépara tous ses artifices mystiques . Le combat était fini avant d´avoir commencé. Malobè n´a pas pu résister à Ngomninga. Attaché dans une pirogue, il fut livré aux bateaux négriers. Le chanson racontant cette légende est le véritable hymne du Ngondo.
Chaque année, au début de la saison sèche (décembre), cette assemblée est l’occasion de réjouissances sur les berges du Wouri à Douala.
La veillée du Ngondo : Selon le scénario consacré, les manifestations marquants l´expression spectaculaire du Ngondo commencent par une veillée de méditation grave et soutenue, ponctuée de prières, chants danses, jeux divers. Elle se déroule en un lieu symbolique, à l´ombre symbole ou à proximité d´un sanctuaire sur la surveillance d´un service d´ordre traditionnel particulièrement vigilant.
Le lendemain matin, jour du Ngondo, dès 5 heures, ses grands dignitaires suivis de leur état-major et d’une foule imposante d’hommes et de femmes, tous en tenue traditionnelle d’apparat, se dirigent vers la plage du Wouri choisie pour le Fête.
C’est souvent au pied du pont du Wouri, parfois dans la petite pêcherie du Yupwè. Mais auparavant, ils auront parcouru toute la ville à pied, pour rendre chaque année un hommage immortel à leurs deux derniers souverains disparus. Ainsi vont-ils se recueillir pieusement et déposer une gerbe de fleurs sur la tombe de Rudolph Duala Manga, héros du peuple, et de King Akwa, Dika Mpondo ma Ngando a Kwa.
Voici les hommes : Tous vont pieds nus, petites toques de fibre de raphia noire sur la tête, pagne de velours ou de soie chatoyante, porté serré autour des reins, chemise blanche à longues manches recouvrant l’ensellure du pagne, ou petits tricots collant au buste, foulards aux couleurs vives, tantôt en bandoulière sur l’épaule ou jetés nonchalamment en écharpe sur le cou, un peu à l’image des maires, chasse-mouche à la main. Il y en a qui sont torse nu, bustes de toutes les gammes de noir, de brun ou de brique cuite. Leur pas est lent et majestueux. Leur masque grave. Ils marchent en silence, dans l’ombre encore fantomatique de la nuit qui se meurt.
Les femmes portent le kaba ngondo. Le kaba est une robe maxi, d’une mode typiquement duala, fort ancienne dans la région. C’est l’habit de tous les jours des vieilles mamans de là-bas. Longue et très ample, cette robe se fait en tissu imprimé de toutes teintes, aux motifs d’une infinie variété. Le groupe des femmes s’avance, lui aussi, dans ce même silence fait tout à la fois de mystère et de ferveur. Leurs pieds, également, sont nus, un foulard de soie ou de velours noué autour des reins, comme dans le musuka des pleureuses, les jours de deuil (basasè kwedi).
Parvenu au bord du fleuve, à l’emplacement élu, tout ce monde foule fébrilement le sable mouillé de la plage et tourne, avec humilité, ses regards vers les eaux sales, glauques et palpitantes. Devant lui, à l’horizon, sur l’autre rive ou sur les mille et un îlots qui hérissent de leurs fouillis verdâtre le milieu du fleuve au Nord du pont, d’immenses champs de palétuviers se profilent à perte de vue, dans un entrelacs de racines aériennes ruisselantes de glu ou parées de minuscules coquillages, plongeant dans l’onde noire de suif et de boue comme les tentacules de pieuvres géantes. C’est la demeure divine des miengu sacrés des Duala, génies craints et vénérés de tous, sirènes ou naïades dispensatrices de toutes leurs fortunes, bonnes ou mauvaises.
Puis, subitement, une voix de stentor s’élève par-dessus la clameur sourde, tandis que les palétuviers touffus en reprennent au loin l’écho, par saccades tardives et émouvantes. Le chef-président parle et demande le silence. Cela annonce le commencement du rituel au son du ngoso – une façon de chanter caractéristique des peuples côtiers du Cameroun, des miken – des clochettes à une voix qui sont accordées ensemble selon un timbre et un rythme particulier, et des mbaka. D’abord, c’est un solo immédiatement suivi d’un duo… Puis le choeur enchaîne sur un rythme sourd, compact, majestueux, d’une incomparable richesse d’harmonies et d’une beauté mélodieuse pour nous sans pareille Ya, Malobè, Ya, Malobè, Malobè a si wèli Engômga : Malobè n’a pu résister à Engômga.
Dans ce chant, les Duala se moquent de Malobè, autrefois leur terreur aux marchés de Pongo. De ce Malobè qui se croyait invincible. Mais que la force supérieure d’Engômga finit par mettre à genoux. Aujourd’hui, c’est le chant du ralliement, l’hymne à l’union.
Après, vient l’esa ya mboa, la prière collective aux ancêtres disparus, l’invocation solennelle des miengu.
Au moment de la cérémonie du serment, toute l’assistance entre dans un état de transe trépidante, comme mue et possédé par le jengu. On se trémousse, on trottine sur place, des milliers de bras gesticulent tels des manivelles, comme dans la danse des malôkô, propre aux pas de lutte traditionnelle. Le tout cadencé par le son cristallin des clochettes.
Par cette prière collective, le Ngondo implore les miengu afin qu’ils protègent et gardent son peuple bien-aimé, qu’ils le couvrent de toutes les bénédictions, qu’ils le comblent de toutes les vertus de la terre : force, sagesse, intelligence, richesse ; qu’ils lui apportent la prospérité en tout, une plus grande fécondité des femmes, des parties de pêche fructueuses, de bonnes récoltes, l’union de tous dans la fraternité et l’amour du prochain, la paix dans les foyers et sur l’ensemble du pays… Que, du même coup, les miengu conjurent et éloignent du peuple tous les maux d’ici bas : la mort, le deuil, la stérilité des mères de famille, la pauvreté et la misère, la haine et la désunion.
Mais dans tout ce rituel du Ngondo, la minute la plus pathétique, la plus poignante, la plus subjugante, celle qui accroche le plus l’attention, retient le curieux et intrigue la profane, c’est, sans aucun doute, celle de la cérémonie d’immersion du vase sacré dans les profondeurs du Wouri, autre demeure mystique des génies peuplant le fleuve, les miengu. C’est le siba l’eloko, qui consiste en l’immersion d’une marmite sacrée dans le Wouri par un plongeur qui reste 9 minutes sous l’eau pour rendre visite aux ancêtres qui se trouvent au fond du Fleuve. Lorsqu’il refait surface, la marmite n’est pas mouillée et elle contient le message des ancêtres que les initiés vont décoder avant de l’annoncer à la foule impatiente. Tous les chefs traditionnels sont présents pour écouter le message des sages et des ancêtres pour l’année à venir.
De nombreuses festivités sont encore au programme du Ngondo : concours de lutte Sawa, de danses traditionnelles, courses de pirogues et élection de Miss Ngondo constituent les réjouissances moins sacrées du jour.
Le dernier message, lu le 2 décembre 2012 par Sammet Bell, secrétaire général du Ngondo, dit ceci : Les ancêtres sont satisfaits du travail abattu pendant ces deux dernières années. Ils insistent que le combat mené pour la paix continue. Maintenant, ils demandent que nous soyons véridiques, que nous apprenions à dire la vérité.